Université Pierre Mendès France – Grenoble 2 / UFR Sciences Humaines / Département de philosophie / Master 1ère année
Séminaire de Philosophie politique (UE 4), année universitaire 2013-2014, 1er semestre
Les jeudis matins de 10 à 12 h, Domaine Universitaire, 1281, avenue Centrale, 38400 Saint-Martin d'Hères, Salle BSHM P2
Pr. Thierry Ménissier : Philosophie politique des mondes émergents
Jeudi 14 novembre
Intervention de Thomas Jesuha (agrégé de philosophie)
« Le néolibéralisme et le libertarisme,
positions de référence de l’hyperindividualisme contemporain ? »
Résumé
Nous essaierons de nous étonner – afin de la questionner – à propos d’une puissante tendance actuelle qui semble lier de manière intime développement technologique et expression du désir individuel. Le problème sera de nous demander si notre adhésion grandissante à un modèle individualiste des choix de vie est à mettre au compte d’une structure passagère (et indésirable ?) des rapports économiques (capitalisme) ou bien à celui d’une véritable révolution de notre subjectivité : l’homme augmenté sera-t-il nécessairement homo liberalis ou bien reconnaîtra-t-il la prééminence de certaines règles sur son désir ?
Bibliographie
De Lagasnerie, R., La dernière leçon de Michel Foucault, Paris, Fayard, 2012
Goffette, J., Naissance de l’anthropotechnie, Paris, Vrin, 2006
Hottois, G. Essais de philosophie bioéthique et biopolitique, Paris, Vrin, 1999
Lordon, F., La société des affects : Pour un structuralisme des passions, Paris, Seuil, 2013
Sloterdijk, P., Règles pour le parc humain, Paris, Fayard, 2010
Recherches en cours
Hannah Arendt a formulé un sévère diagnostic de l’expérience que fait l’homme d’être dans un monde : l’époque moderne, avec son arsenal de nouvelles sciences et techniques et armée d’une nouvelle philosophie sceptique, a inauguré une ère du doute dans laquelle l’histoire et la nature cessent de nous présenter une objectivité rassurante : désormais, l’homme est techniquement capable de bouleverser – apparemment sans limites – son environnement et sa propre nature biologique.
Ainsi caractérisé par une forme d’anomie, le monde contemporain semble donc plus que jamais ouvert à l’expression absolue des désirs individuels : d’abord vouées à stimuler le développement capitaliste, les technologies se mettent un peu plus chaque jour au service d’une demande privée qui, fait nouveau, n’émane plus d’un besoin thérapeutique mais d’un désir d’amélioration et de performance (prothèses, psychotropes, chirurgie esthétique, eugénisme, intelligence artificielle…)
Dès lors, comment intégrer l’idée d’une régulation collective (Étatique ou communautaire ?) de processus qui, semble-t-il, relèvent d’un modelage strictement individuel ? Comment relever le défi arendtien qui nous enjoint à repenser la possibilité d’un monde commun malgré ou avec l’émergence de l’homme augmenté ? Ou encore, doit-on s’en tenir à l’idée d’un rejet pur et simple de l’intervention étatique qui accompagne l’appropriation individuelle des technologies ?